En 1922, une conférence du mystérieux Jean Valjean (un pseudonyme) connaît un succès retentissant. Transcrit pour être imprimé puis réimprimé à plusieurs reprises, le texte du discours, au grand dam du clergé de l’époque, se répand comme une traînée de poudre. La crise propose des pistes de réflexion critique qui mettent en valeur l’intégrité dont fait preuve son auteur : « Je ne suis inféodé à aucun parti, je ne suis dominé par aucun intérêt et je plaide une cause pour laquelle personne ne paie. » Jean Valjean y fait œuvre de formateur et de pédagogue. À l’attention de son public, il traque méticuleusement les origines de la crise dans le fonctionnement même et la violence constitutive du capitalisme.
Son message aux « sans-travail » est porteur d’une radicalité que l’on aimerait lire plus souvent : « Les affaires du monde sont conduites par une bande de joueurs affolés. Il faut briser cette roulette maudite qui fait danser aux hommes la sarabande. Il faut guérir cette fièvre qui obscurcit la raison. Le profit est l’ennemi du genre humain, et comme la source du profit est la propriété privée des choses nécessaires à la vie commune, il faut plonger le scalpel au plus profond des entrailles de la société pour aller en couper les racines. Cette opération fera couler du sang, mais la vie de la malade en dépend, le salut du monde est là. Il n’y a pas d’autre moyen de mettre fin à la crise. »
Témoignage majeur, illustration de la conscience sociale canadienne-française du début du XXe siècle, l’analyse de Jean Valjean a l’intérêt de montrer aussi les limites morales du temps.